Les effets du harcèlement moral pour les entreprises peuvent être dévastateurs. Ils ne doivent pas être pris à la légère.

Le harcèlement moral fait parti des risques psychosociaux que l’on peut rencontrer en entreprise. Et pour autant, il reste encore mystérieux. Alors que c’est une problématique grave qui touche de nombreux secteurs professionnels, y compris le milieu vétérinaire. 

Une étude québécoise publiée en 2018 a démontré que les trois secteurs canadiens ayant la plus forte présence de harcèlement moral en leur sein étaient le domaine des ONG (organisation non gouvernementale), celui de la santé et celui de l’éducation. Il n’y aucune raison que les choses soient différentes en France.  

Or les conséquences de cette violence insidieuse peuvent être dévastatrices, tant pour les victimes individuelles que pour l’ensemble de l’entreprise.

Nous avons déjà vu les effets sur les victimes dans un article précédent. Stress, isolement, anxiété, troubles du sommeil. Voire dépression. Ce ne sont que des symptômes parmi d’autres. Mais tous aboutissent directement à des répercussions graves pour les employeurs et leurs sociétés. 

Et la dégradation des conditions de travail n’est qu’une seule de ses conséquences ! 

Malgré tout, ce sujet reste tabou. Le déni indéniable. Les victimes subissent. Les témoins se taisent. 

Pourquoi une politique de l’autruche en entreprise face au harcèlement moral ?

Et clairement, disons-le tout de suite. Ce n’est pas la bonne solution ! Malheureusement, elle est très souvent observée en entreprise. 

Outre le fait que cela cache souvent une méconnaissance des effets du harcèlement moral, si ce dernier perdure c’est souvent par peur de l’action.

La fausse bonne idée : un mal pour un plus grand bien

En effet, encore aujourd’hui, certaines entreprises estiment préférables de taire les problèmes. Persuadées que lutter contre certains agissements causerait plus de problèmes qu’autre chose. L’idée générale est de tolérer de « petits » larcins pour favoriser le bon fonctionnement interne. 

Je vous donne un exemple : imaginons une société où les employés piquent les stylos, les post-it ou des feuilles. Cela représente une perte pour l’employeur. Car après tout, c’est lui qui les a achetés. Mais les salariés estiment qu’ils sont en droit de le faire compte tenu du temps et de l’énergie qu’ils accordent à la croissance de cette entreprise. Pourtant, rappelons qu’ils reçoivent tous les mois un salaire pour cela. L’employeur est donc confronté à un dilemme.

  • Soit il dit quelque chose, convoque et punit les fautifs. Mais dans ce cas, il peut s’attirer la foudre des employés. Ces derniers travaillent moins. Voire se mettent en grève. Sans oublier, qu’il sera moins apprécié (et oui l’ego a aussi son importance). 
  • Soit il tait l’affaire, accepte d’avoir des pertes financières incontrôlées. Mais ses employés sont contents et apprécient travailler là compte tenu des « avantages en nature » dont ils bénéficient de façon tout à fait illégale. 

​Alors je vous mets dans le mille : l’employeur préfère se taire. Cela nuit moins à l’organisation et au fonctionnement.

Schéma illustrant le faux dilemme d'un employeur face à un problème dans son entreprise. La justice réclame qu'il résolve le problème mais s'il parle alors cela implique une grève. Et donc il n'est pas content. Dans le deuxième scénario, il se tait et son entreprise croît financièrement.

Mais est-ce une bonne solution sur le long terme? Je pense que vous vous doutez que non. Et vous auriez raison. 

Et pour le harcèlement moral ?

Eh bien, c’est pareil. Les œillères que se met la direction lui empêchent de voir les conséquences lourdes et invasives. La peur de représailles internes paralyse. 

Aller voir l’auteur des faits. Le convoquer. Réprimander ses agissements. Cela peut être une réelle difficulté. Que cette personne soit un employé (fait rare de harcèlement ascendant) ou un associé (harcèlement descendant). La peur de subir de la violence psychologique directement peut également être un frein. 

​Alors souvent la hiérarchie se tait. Tolère. Et finalement devient complice

Et l’entreprise souffre en silence. 

Il est une chose importante à noter : s’il y a du harcèlement moral envers les employés dans une entreprise alors cela signifie que la direction a laissé faire. Que cela soit inconsciemment. Ou pire consciemment. 

La direction est responsable de ne pas avoir puni ni imposé un climat de respect où le harcèlement moral ne peut se développer. Et pourtant, c’est une obligation de l’employeur. 

Et outre ce manquement évident à une obligation du code du travail (article L4121 du Code du Travail), rappelons que le harcèlement moral est défini et puni par deux instances : la pénale et celle du travail. Le délit est donc double. Une organisation qui tairait de tels agissements serait alors doublement pénalisée.

Mais en dehors de ces sanctions, il existe d’autres conséquences bien plus subtiles mais parfois très coûteuses au harcèlement moral dans une entreprise.

Il est crucial de reconnaître qu’elles ne limitent pas aux individus. Il est temps de retirer ces œillères et d’examiner l’impact profond du harcèlement moral sur l’ensemble d’une entreprise. 

Les effets du harcèlement moral pour les entreprises

1. Atmosphère de travail détériorée

Flash info : Des agissements répétés de harcèlement moral sur le lieu de travail porte atteinte à l’ambiance générale. 

Un climat de travail négatif se propage alors rapidement et affecte l’ensemble de l’équipe. 

La méfiance, la peur et le manque de solidarité entre collègues créent une atmosphère de travail stressante et démotivante. Les personnes non directement harcelées peuvent également souffrir en assistant à la maltraitance de leurs collègues, ce qui augmente leur malaise et affecte leur moral et leur productivité. 

Le harcèlement moral même contre un seul individu suffit à créer une atmosphère de travail négative. 

« Dès que je passais la porte de la clinique, je savais s’il était présent. La tension était lourde et stressante. », Clara

2. Baisse de la performance

Par ailleurs, les victimes mais également le climat de peur qui règne dans l’entreprise entraîne :

  • Une diminution de la concentration
  • L’augmentation des erreurs
  • Une baisse de motivation

Les salariés sont dans un état de peur et d’hypervigilance. Ne sachant quelle réflexion ou remarque va tomber. Leur attention est donc divisée entre leur tâche et la présence du harceleur. 

Nécessairement, cela diminue grandement les performances individuelles. Ce qui se répercute indéniablement sur l’efficacité globale de l’entreprise. 

La peur de commettre des erreurs peut également paralyser l’action des salariés, réduisant leur efficacité.

« Je me sentais vite dépassée. Incapable de gérer plusieurs choses à la fois. Particulièrement si je devais demander l’avis à mon bourreau.», Clara

Cette baisse de productivité peut entraîner des retards dans les soins aux hospitalisés, une diminution de la qualité des services et des soins aux animaux et une perte de compétitivité. Tout cela aboutissant inexorablement à une baisse de rentabilité.  

3. Turnover élevé

Un mal-être persistant impliquent également une baisse de leur implication. Pourquoi bien travailler pour une entreprise qui fait autant souffrir? Alors non seulement, les membres de l’équipe sont moins efficaces qu’un employé bien investi, mais il remettent aussi plus facilement leur démission à leur hiérarchie.

C’est la raison pour laquelle les environnements de travail toxiques, où le harcèlement moral est présent, connaissent souvent un turnover élevé

Les vétérinaires et autres salariés cherchent à fuir ces conditions néfastes. Ce qui entraîne une rotation fréquente du personnel. Or le recrutement et la formation de nouveaux employés sont coûteux. Chronophages. Et la perte de collaborateurs expérimentés peut être particulièrement dommageable pour une entreprise.

« Au bout de 2 mois d’exercice, j’ai appris que j’étais la 42ème salariée en 5 ans. J’ai commencé alors à me poser des questions..», Mélodie

4. Réputation de l’entreprise

Il est un impact que l’on voit moins et qui pourtant a toute sa place dans les effets du harcèlement moral pour les entreprises. Il s’agit bien sûr de sa réputation. 

Car même sans avoir affaire à un ancien salarié victime qui déprécierait ouvertement la structure, il y a des signes facilement repérés par un inconnu et qui viennent ternir l’image de l’entreprise. 

– Le turnover important du personnel a un impact négatif sur les clients qui apprécient avoir affaire au même professionnel pour leur animal. Être confronté régulièrement à de nouvelles têtes peut faire fuir certains clients.

– Par ailleurs, cela peut engendrer de la mauvaise publicité qui dissuadera d’éventuels clients de faire appel à vos services. Entraînant une perte de confiance dans vos compétences et une perte de revenus pour votre entreprise. N’oubliez pas que les clients parlent entre eux. Et encore plus avec les réseaux sociaux.

– Enfin, voir régulièrement des offres d’emploi pour votre structure, ou une offre qui ne disparaît pas est mauvais signe. Nécessairement se posera la question de « Y a-t-il anguille sous roche? ». Si l’offre revient régulièrement, c’est que les gens ne restent pas. S’ils ne restent pas, il y a un problème. Alors plus le temps passe, moins il y a de candidats.

Ainsi une mauvaise réputation conduira inexorablement à une croissance ralentie de l’entreprise.

5. Problèmes juridiques et réglementaires

Outre les poursuites judiciaires possibles qui font l’objet d’un autre article, une entreprise qui laisse perdurer du harcèlement moral s’expose à de nombreux problèmes. 

Parmi eux, on peut retrouver : 

Enquêtes et inspections par les organismes de régulation du travail. Ces derniers peuvent enquêter et prendre des mesures contre une entreprise où sévit du harcèlement moral. En dehors des coûts supplémentaires que cela engendre, de telles enquêtes perturbent le bon fonctionnement. Il faut aussi noter qu’elles sont très chronophages pour la hiérarchie.

 – Perte d’accréditations et de certifications professionnelles. Des comportements de harcèlement moral non éradiqués peut motiver les grandes instances à suspendre l’activité de l’entreprise. Ce qui a bien évidemment des conséquences financières. 

– Dans le cadre des grands groupes où la recherche de soutien financier peut être important. La présence de harcèlement moral peut entraîner la perte de celui-ci et de potentiels partenariats. 

– Enfin, il va s’en dire que l’entreprise s’expose également au risque de plaintes collectives de la part des anciens et actuels employés. Or une poursuite groupée attire l’attention médiatique ce qui ne ferait qu’amoindrir la réputation de l’établissement.

6. Coûts accrus

Tous ces impacts listés plus haut ont de forts coûts financiers. Des coûts non négligeables. 

– Les victimes, inattentives de part leur souffrance psychologique, sont plus sujettes à commettre des erreurs. Du matériel peut se retrouver à la poubelle sans avoir été utilisé par des erreurs de prélèvements de produits par exemple ou encore des erreurs d’asepsie. Des erreurs de facturation peuvent également être observées impactant directement le bénéfice journalier.

– Les frais médicaux et les congés maladie augmentent lorsque les employés souffrent de troubles physiques et psychologiques liés au harcèlement. L’entreprise se retrouve alors à payer un salarié qui n’effectue aucun travail bénéficiaire pour elle.

– Les coûts liés au recrutement, à la formation et à l’intégration de nouveaux employés s’accumulent. Sans compter les coûts de départs des anciens salariés.

– Et bien sûr, l’entreprise peut également faire face à des litiges juridiques et à des indemnités pour les victimes, augmentant encore les dépenses. Ces conséquences seront détaillées dans un prochain article.

Conclusion

Ainsi on comprend bien que les effets du harcèlement moral pour les entreprises sont dévastateurs.

Le harcèlement moral est une réalité alarmante qui doit être prise au sérieux. Les dommages faits aux entreprises passives face à de tels agissements peuvent être lourds et longs à réparer. 

Chez « Un moral aux abois », nous nous engageons à lutter contre le harcèlement moral dans le milieu vétérinaire. En sensibilisant. En offrant du soutien. Et en mettant en place des mesures préventives. Nous voulons créer un environnement de travail sain et respectueux pour tous les professionnels de la santé animale.

Ensemble, disons non au harcèlement moral et œuvrons pour un avenir meilleur pour nos équipes vétérinaires.


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