Qu’est-ce que le harcèlement moral ?
En quelques mots, le harcèlement moral se caractérise par des comportements répétés qui rendent une personne inconfortable. Qui portent atteinte à sa dignité. Dégradent ses conditions de travail.
Les victimes, souvent salariés, réalisent bien trop tardivement ce qu’elles subissent. La dégradation progressive de leur santé mentale peut alors avoir de graves conséquences.
C’est pourquoi le harcèlement moral est aujourd’hui un des plus importants risques psychosociaux dans le monde du travail. La justice et les cours de cassation continuent à ce jour de faire évoluer les mesures de lutte contre ce mal encore trop présent.
Le harcèlement moral : définition juridique et cadre légal
Le harcèlement moral a été intégré dans la législation française avec la loi du 17 Janvier 2002. Elle est connue sous le nom de « loi de modernisation sociale ».
On doit notamment cette intégration à Marie-France Hirigoyen. En 1998, elle a publié son livre nommé « Le harcèlement moral : la violence perverse au quotidien ».
C’est ce texte qui a influencé les réflexions législatives de l’époque. Elle a joué un rôle de pionnière dans la conceptualisation et la définition du harcèlement moral. Mais également dans son inscription dans la loi, en posant les bases de la reconnaissance juridique de cette forme de violence psychologique.
Ainsi, le harcèlement moral, tel que défini par le Code du travail français à l’article L1152-1 et par le Code pénal français à l’article 222-33-2, est défini comme tel : « agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. »
Le harcèlement moral étant inscrit dans deux codes, il s’agit d’un double délit. C’est donc d’un délit pénal mais également d’une infraction au Code du travail. L’auteur des faits, ou harceleur, est donc susceptible d’être sanctionné par plusieurs instances.
Il est utile de rappeler que ces conséquences pénales, administratives et judiciaires sont applicables quel que soit le secteur d’activité de l’entreprise. Qu’il soit public ou privé.

Il est important de noter que, outre l’agresseur, la loi stipule que l’employeur est responsable de la situation de harcèlement moral dans son entreprise. Quelle que soit la personne ou l’équipe concernée.
Pour en savoir plus sur les sanctions et les peines encourues, nous vous invitons à consulter notre article sur ce sujet.
Vous êtes employeur et souhaitez comprendre votre responsabilité et vos obligations en matière de harcèlement moral ? Rendez-vous sur la page dédiée.
Reconnaître une situation de harcèlement moral au travail
Le harcèlement moral est une forme de violence psychique qui vise la destruction progressive d’une personne ou d’un groupe. Il a des conséquences graves sur la santé mentale et le bien-être des victimes. Il entraîne la dégradation des conditions de travail. Une mauvaise entente entre collègues. Et des conséquences sévères sur la vie privée des victimes et de leurs proches.
Malheureusement, c’est une réalité fort préoccupante dans le milieu vétérinaire.
Une enquête menée par l’Observatoire ordinal des vétérinaires a révélé qu’en 2023, le nombre d’agressions contre les vétérinaires a augmenté de 52% ! 28% d’entre elles ont été physiques. Et n’oublions pas que la plupart ne sont pas déclarées.
Quid des autres acteurs (ASV, étudiants, stagiaires, représentants…) ?
Alors dans une société où les violences externes se font de plus en plus entendre, il est d’autant plus inacceptable de faire face également de la violence interne dans une entreprise.
Il est donc important de comprendre ce qu’est le harcèlement moral, ses manifestations et les recours juridiques ou non à saisir pour le combattre.
Les signes de harcèlement moral
Le harcèlement moral peut se manifester de diverses façons. L’Etat propose plusieurs exemples sur son site service-public.fr. Les exemples cités sont :
- Insultes régulières et répétées
- Communications ou messages téléphoniques intempestifs
- Réflexions déplacées vis-à-vis d’un genre
- Menace de licenciement
- Retrait de mission
Le point qu’il est important de noter est qu’il s’agit d’EXEMPLES. Ce n’est certainement pas une liste exhaustive. C’est notamment sur ces propositions que la gendarmerie ou la police se basent lorsque l’on porte plainte pour harcèlement moral. Or il faut bien comprendre que cela est très réducteur. On peut aisément ajouter à cette liste :
- Des torsions de réalité
- Des sous-entendus
- Des allusions malveillantes
- Des humiliations
- Des plaisanteries grossières
- Des gestes obscènes
Car oui. Il est très important de le comprendre. Le harcèlement sexuel n’est qu’un pas de plus dans le harcèlement moral.
Le cas particulier du harcèlement sexuel
Le harcèlement sexuel a intégré la législation française en 1992 avec la loi du 22 Juillet 1992. La notion de harcèlement sexuel avait alors été introduite dans le Code pénal. Toutefois, la définition initiale restreinte a évolué avec les années.
Une modification majeure en 2012 a permis de l’élargir, ce qui a renforcé la lutte contre le harcèlement sexuel en apportant une définition plus précise.
On rappelle ici la définition du harcèlement sexuel telle qu’elle est inscrite dans le Code pénal (article 222-33) : « Le harcèlement sexuel est le fait d’imposer à une personne, de façon répétée, des propos ou comportements à connotation sexuelle ou sexiste qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante. »
Le harcèlement sexuel peut être physique mais aussi verbal ou non-verbal. Le simple fait d’imposer à une personne des propos à connotations sexuelles de façon répétée fait de ladite personne une victime de harcèlement sexuel…
Les différentes catégories d’actes de harcèlement moral
Il est possible de classer tous ces signes de harcèlement moral en catégories selon l’impact qu’ils auront sur la victime. Globalement, on retrouve :
- Disqualification : l’existence même de la victime est reniée
- Discréditation au sein de l’équipe
- Brimade : confier des tâches dégradantes, des exclusions répétées
- Isolement professionnel : exclusion d’une personne du groupe de travail, marginalisation d’un individu
- Pousser à la faute : notamment en délivrant une charge excessive de travail ou en retenant des informations essentielles au bon travail de la victime
La notion importante de répétition
De manière générale, ce qu’il faut retenir est que tout acte susceptible de porter atteinte à la santé physique ou mentale, acte(s) répété(s) dans le temps, est, de facto, du harcèlement moral. Il serait bien impossible d’en faire une liste exhaustive. Toutefois, il ne faut pas tomber dans l’excès inverse. Tout n’est pas harcèlement moral. La notion de répétition ici est très importante. Ce sont les actes répétés qui causent les blessures mentales ou psychiques liées à du harcèlement moral.
Pour mieux comprendre cette notion de répétition, pensez à votre bouchon perforable (notamment sur les flacons de produit) : ce n’est pas le passage d’une aiguille qui va l’abîmer. En revanche, au bout d’un certain nombre de passage d’aiguille, vous allez être obligé d’en changer ou de jeter votre flacon pour éviter tout risque de contamination. Le laboratoire vous indique d’ailleurs dans la notice combien de fois vous pouvez prélever avant que le flacon ne soit plus considéré comme stérile et consommable.
Votre santé mentale et psychique est comme ce bouchon : vous ne verrez pas forcément l’effet d’un traumatisme mais à force de répétition vous allez être abîmé(e). Cette usure est l’image parfaite de l’altération de votre santé mentale et psychique.
Malheureusement, contrairement à ce flacon, votre santé n’est ni jetable ni remplaçable…

Victime ? Les effets sur votre santé sont divers et peuvent être très sévères. Nous vous invitons à aller lire notre article entièrement dédié à ce sujet ! Employeur ? Sachez que le harcèlement moral peut avoir des préjudices très néfastes sur votre entreprise. Découvrez-les ici.
Les différents types de harcèlement moral
Le harcèlement moral descendant
L’agresseur est un membre de la hiérarchie, la victime un subordonné.
Le harcèlement moral vertical est le type le plus fréquemment rencontré. C’est celui du supérieur hiérarchique harcelant un salarié ou un subordonné.
Selon une étude de Qualisocial menée en 2022, 1 manager sur 3 estime avoir déjà été auteur de harcèlement moral.
Dans le milieu vétérinaire, il peut être le cas d’un vétérinaire sur une auxiliaire vétérinaire ou d’un vétérinaire associé sur un vétérinaire salarié par exemple.

Le harcèlement moral horizontal

Cette relation toxique s’observe entre deux personnes de même niveau hiérarchique. Deux collègues.
Ce type de harcèlement s’observe dans une équipe en souffrance.
Cela peut être le cas d’un membre du personnel qui harcèle d’autres personnels sans raison apparente. Cet individu harcelant est alors fautif et cause directement des troubles au sein de l’équipe.
Mais il peut également s’agir d’un salarié en partie responsable de la situation de harcèlement moral. En effet, l’un des mécanismes de défense en étant victime de faits de harcèlement moral est de devenir soi-même un bourreau pour ses collègues. Ainsi, le fait de harceler en retour peut être seulement réactionnel.
La présence de harcèlement moral horizontal peut être le signe d’un mal plus répandu au sein de l’entreprise.
Le harcèlement moral ascendant
Ce dernier cas s’observe lorsqu’un subordonné harcèle son supérieur hiérarchique.
Bien plus rare, cette forme de harcèlement moral ne doit pas être négligée pour autant. Elle est d’ailleurs plus présente lorsque la position de force entre les deux personnes est plus floue.
Une simple difficulté ou peur à recruter peut favoriser la mise en place de ce type de harcèlement moral au travail. Les victimes de harcèlement moral sont alors les supérieurs hiérarchiques, les auteurs des faits les salariés.
Cette situation de violence au travail est particulièrement difficile. L’employeur a peu de moyens de lutte contre son salarié. Le droit du travail est majoritairement orienté dans le sens de la protection de ce dernier. Toutefois des solutions restent accessibles. Des dispositions peuvent être mises en place dans les contrats.
Mais il est à noter que la prévention reste la solution la plus pertinente et la plus protectrice pour les employeurs. Allez voir notre article dédié à cela ici. N’hésitez pas à demander conseil auprès d’un avocat ou d’un syndicat.

L’importance d’agir face à du harcèlement moral
Le milieu vétérinaire étant déjà en souffrance, que l’on soit vétérinaire ou ASV ou tout autre acteur de ce milieu, il est important de prévenir, d’alerter et, le cas échéant, de dénoncer. De tels actes peuvent mener à des décisions irrévocables et irréversibles de la part des victimes. En parler permet de commencer à se guérir mais il permet aussi d’éviter d’autres potentielles victimes. Il faut le dénoncer sans quoi ce mal va persister.
Et alors peut-être, un jour, l’objectif de notre association sera atteint. Nous travaillerons tous dans un environnement respectueux et sain pour tous.
Mais cet objectif n’est atteignable que grâce à vous. Ce n’est qu’ensemble que l’on pourra garantir la protection et la sécurité de tous nos collaborateurs du monde vétérinaire.
Agir en tant que victime de harcèlement
Maintenant, je ne vais pas vous le cacher. Dénoncer est difficile. Il faut privilégier le dialogue avec votre supérieur hiérarchique afin que chacun puisse prendre conscience du ressenti de l’un comme de l’autre. Mais lorsque cette possibilité s’avère être une impasse. Il faut passer par d’autres voies pour se faire entendre.
Ces voies vous sont présentées dans cet article.
La dernière option est de porter plainte. Or il faut savoir que lors du dépôt de plainte, la gendarmerie ou la police vous pousse dans vos retranchements pour vérifier que vous ne mentez pas. Les représentants de l’ordre se cantonnent aussi essentiellement aux exemples de harcèlement moral cités par l’Etat que je vous ai donnés plus haut. Vous les retrouverez directement sur site du gouvernement www.service-public.fr.

Témoignage de la Présidente d’Un moral aux abois :
« Il faut beaucoup de force pour porter plainte. Surtout quand on est soi-même en détresse psychologique. Tout au long de mon dépôt de plainte, qui a duré 3 heures, le gendarme n’a pas arrêté de me dire que ce que je faisais ne servait à rien car peu ou pas de preuve. Ça a été trois heures de lutte où je ne me suis pas sentie écoutée mais plutôt dénigrée par ma pauvre sensibilité de femme qui se sent harcelée alors qu’il n’y a pas de « preuve » matérielle. Je m’étais préparée pourtant mais son discours m’a complètement désarçonnée et il n’a pas noté la moitié des « détails » alors que « l’important est dans le détail » comme il ne cessait de répéter. Après cette première confrontation, je me suis sentie perdue, non assistée et impuissante. Puis j’ai décidé d’y retourner pour le forcer à noter tout ces fameux détails. L’avenant à la plainte a été bien plus facile mais j’y suis allée telle une guerrière qui part en guerre.
Vous relatez mon expérience de ce dépôt de plainte me permet de vous préparer à ce qui peut vous attendre. Bien évidemment, j’avais essayé de discuter de plusieurs façons avec mon employeur et de faire entendre ma voie. Le refus d’écoute a malheureusement abouti à ce dépôt de plainte. »
Agir en tant que témoin de situation de harcèlement moral
Parfois la victime est dans l’incapacité de comprendre ce qui lui arrive. Mais une intervention extérieure peut permettre de mettre fin à une situation de harcèlement moral. Ou de faire réaliser à la victime sa situation.
Pour cela, il faut être présent pour la victime. Lui apporter une oreille attentive. L’inciter à faire un signalement. L’aider dans les procédures.
Mais la responsabilité du témoin est également de ne pas se laisser embrigader par les propos de l’auteur des faits. En effet, l’harceleur va par ses actions tenter de bénéficier d’un effet de groupe. Les critiques et autres actes de harcèlement moral se verront justifiés. Par les réponses de la victime. Ses erreurs. Ou son inefficacité au travail. Découlant directement de sa souffrance mentale.
Les collaborateurs ou collègues salariés doivent donc impérativement ne pas tomber dans le jeu de l’harceleur. Et rester impartial quant aux critiques faites à la victime. Idéalement, ils également doivent être en mesure de transmettre les numéros de téléphone utiles pour l’aider. Vous les retrouvez sur notre page SOS.
Agir en tant qu’employeur face à une situation de harcèlement moral
Etant donné que l’employeur est directement responsable de la situation de harcèlement moral vis-à-vis de la loi, il est important de savoir comment lutter face à un tel contexte.
Pour cela, allez voir notre article décrivant les actions qui doivent être menées pour déresponsabiliser l’employeur.
Conclusion
Le harcèlement moral sont des faits portant atteinte à autrui. Dégradant sa santé mentale. Toutefois, il est important de rappeler que ces agissements doivent être répétés. Un évènement solitaire ne saurait constituer du harcèlement moral.
Alerter comme dénoncer n’est pas chose aisée mais vous ne serez pas seul(e), quel que soit votre rôle. Mais il est de notre responsabilité à tous de prendre la parole. De s’exprimer sur le sujet. De lutter pour un environnement de travail plus sain.
Alors n’attendez plus ! Devenez votre propre héro et celui des autres en ouvrant la voix et en œuvrant pour éradiquer ce mal. Faites un don pour nous aider dans nos actions de sensibilisation !
N’hésitez pas nous écrire si vous souhaitez échanger ou tout simplement si vous en ressentez le besoin !
Pour en savoir plus :
- Comment lutter contre le harcèlement moral en tant qu’employeur ?
- Coment détecter la souffrances des employés en matière de harcèlement moral ?
- Comment prévenir le harcèlement moral en tant qu’employeur ?
- Quelles responsabilités et quelles sanctions pour l’employeur en cas de harcèlement moral ?
- Quels recours possibles pour une plainte classée sans suite ?
Laisser un commentaire